13 Déc Les causes de mortalité des abeilles
La mortalité des abeilles est une préoccupation majeure. Elles font face à diverses menaces, telles que l’utilisation de pesticides aux changements environnementaux. Au-delà de ces causes évidentes, des facteurs moins discutés, comme la sélection artificielle et la perte de diversité génétique, méritent attention. Découvrez les aspects moins connus, et les mécanismes génétiques influant sur la résistance des abeilles aux maladies.
L’invasion du Varroa en Afrique du Sud
Le Varroa est un acarien redoutable pour les abeilles.
Ils se nourrissent de leur hémolymphe (liquide circulatoire) et transmettent divers virus. Cette invasion a eu des conséquences significatives sur les populations d’abeilles mellifères.
Le Varroa a été identifié pour la première fois en Afrique du Sud en 1997. La présence de ce ravageur a suscité des préoccupations parmi les apiculteurs et les chercheurs, car il peut causer des pertes massives et propager des maladies graves. Les scientifiques, tels que Mike Alsopp a étudié la propagation du Varroa en Afrique du Sud. Il a cherché à comprendre les mécanismes de sa dissémination et à développer des stratégies pour contrôler son impact.
L’expérience menée en Suède : le mystère des allèles manquants
Dans le contexte de la recherche sur la résistance des abeilles au parasite Varroa destructor, le chercheur suédois Ingmar Fries a mené une vaste expérience visant à étudier la sélection naturelle et la résistance au Varroa.
Certaines colonies exposées au Varroa présentaient un manque d’allèles associés au comportement hygiénique spécifique au Varroa (SHV). Cette absence compromet la diversité génétique, posant ainsi un défi pour la résistance naturelle au parasite.
L’énigme des allèles manquants dans la résistance au Varroa a été explorée par Ingmar Fries. Son expérience novatrice avec 150 colonies d’abeilles de différentes races a révélé des résultats inattendus, mettant en lumière des défis dans la préservation des allèles rares cruciaux pour la résistance.
L’absence d’allèles liés au comportement hygiénique spécifique au Varroa (SHV) dans certaines colonies expose une lacune dans leur diversité génétique pour se défendre contre le parasite.
Ingmar Fries a cherché à comprendre si la sélection naturelle conduirait à la résistance en collectant 150 colonies d’abeilles de différentes races. Les résultats, bien que spectaculaires, ont révélé des défis inattendus, tels que la faible survie des colonies et l’absence d’allèles spécifiques au comportement hygiénique contre Varroa (SHV).
Contraste hémisphérique
En l’hémisphère sud, en particulier en Afrique du Sud et en Amérique du Sud, l’acarien Varroa a été initialement un défi majeur, atteignant des densités élevées. Cependant, une observation intrigante est que, malgré des débuts difficiles, les abeilles d’Afrique du Sud ont rapidement développé une résistance au virus de l’aile déformée associé à Varroa. De même, l’invasion du Varroa en Amérique du Sud, bien que moins documentée, a suivi une trajectoire similaire de résilience.
En revanche, l’hémisphère nord, en particulier l’Europe occidentale et l’Amérique du Nord, présente une image contrastante. Même après plus de 40 ans de présence du Varroa et malgré l’utilisation de traitements chimiques, les abeilles continuent de subir une forte mortalité. Les raisons de cette résistance persistante dans le nord demeurent énigmatiques.
Les différences dans la densité d’abeilles sauvages entre les deux hémisphères pourraient expliquer en partie ces disparités. L’Afrique du Sud et l’Amérique du Sud bénéficient de populations plus abondantes d’abeilles sauvages, offrant ainsi un réservoir génétique plus riche et des conditions favorables à la sélection naturelle. En revanche, l’intensité de la gestion des colonies d’abeilles dans le nord, avec des interventions fréquentes des apiculteurs, peut inhiber ou entraver la sélection naturelle. . Ces différences de contexte expliquent en partie les divergences dans l’évolution de la résistance au Varroa.
Comment les abeilles se défendent
Les abeilles mellifères, en tant qu’insectes sociaux, vivent en colonies très peuplées. Ainsi, cela crée des conditions favorables à la propagation rapide des maladies infectieuses. Leur mode de vie collectif et la proximité au sein de la ruche facilitent la transmission des agents pathogènes tels que les bactéries, les virus et les champignons.
La propolis joue un rôle crucial dans la défense de la colonie contre les infections.
C’est une substance résineuse collectée par les abeilles à partir de diverses sources végétales. Les abeilles l’utilisent pour enduire l’intérieur de la ruche, formant ainsi une barrière antimicrobienne. La propolis contient des composés antibactériens, antiviraux et antifongiques qui aident à prévenir la prolifération des agents pathogènes.
En plus de la propolis, le système immunitaire des abeilles est une autre ligne de défense essentielle. Les abeilles possèdent un système immunitaire inné et adaptatif qui leur permet de lutter contre diverses infections. Par exemple, leur système immunitaire inné comprend la production de peptides antimicrobiens, tandis que le système immunitaire adaptatif leur permet de développer une mémoire immunitaire après avoir été exposées à certains agents pathogènes.
Le nectar et le pollen jouent également un rôle important dans la défense des abeilles contre les infections.
Les plantes produisent divers composés bioactifs, dont certains ont des propriétés antibiotiques et antifongiques. Lorsque les abeilles collectent le nectar et le pollen auprès des fleurs, elles introduisent ces composés dans la ruche.
Le nectar contient des sucres et d’autres substances, y compris des composés antimicrobiens. Ces derniers aident à prévenir la croissance des bactéries et des champignons. Les abeilles transforment le nectar en miel. Il est stocké dans la ruche, et la nature antimicrobienne du miel contribue à maintenir un environnement sain à l’intérieur de la ruche.
Quant au pollen, il est une source importante de protéines pour les abeilles. En plus de sa valeur nutritionnelle, le pollen contient également des composés bioactifs tels que des enzymes, des peptides antimicrobiens et des antioxydants. Ces substances aident à renforcer le système immunitaire des abeilles et à les protéger contre les infections.
Ainsi, les abeilles utilisent une combinaison de ressources, y compris la propolis, le nectar, le pollen et leur propre système immunitaire, pour maintenir la santé de la colonie et se défendre contre les maladies.
Cependant, la question cruciale est de savoir comment les abeilles peuvent s’adapter aux nouvelles variantes d’agents pathogènes.
Les abeilles mellifères ont développé deux armes puissantes pour faire face aux pathogènes.
La polyandrie est un comportement d’accouplement. Les reines s’accouplent avec plusieurs mâles, et la fréquence élevée de recombinaison génétique permettent de recruter de nouveaux allèles rares. Ces allèles peuvent ensuite être combinés pour créer de nouveaux génotypes résistants, une stratégie essentielle pour compenser leur reproduction plus lente et des densités de population plus faibles que celles des pathogènes.
Sélection artificielle et ses coûts
La sélection artificielle des abeilles de race, axée sur des caractéristiques spécifiques telles qu’un rendement élevé en miel, est une pratique courante. Cependant, cette sélection réussie a un prix significatif : la perte d’allèles rares. En prélevant un petit échantillon d’une grande population pour la sélection, les allèles rares ont moins de chances d’être inclus dans la sélection. Ainsi cela conduit à leur disparition progressive. Cette diminution de la diversité génétique compromet aussi la résistance naturelle des abeilles aux maladies.
Des études récentes suggèrent que la sélection pour des caractéristiques spécifiques, comme la production de miel, peut avoir des conséquences sur la durée de vie des abeilles. Une diminution de la durée de vie médiane aux États-Unis, attribuée à l’acarien Varroa, soulève des questions sur les effets à long terme de la sélection et des traitements chimiques. Un métabolisme plus rapide, résultat de la sélection pour un rendement élevé, peut également rendre la survie hivernale plus difficile.
Le fléau des faux bourdons
L’invasion de faux bourdons exogènes menace la pureté génétique des abeilles domestiques en laissant les faux bourdons s’accoupler librement. Cela peut introduire des gènes indésirables, compromettant la résistance aux maladies, avec des conséquences néfastes sur la santé génétique des abeilles domestiques.
Quand les apiculteurs élevent des abeilles de race spécifique, ils envoient des reines non appariées (vierges) à une station d’accouplement, mais laissent les faux bourdons (mâles) s’accoupler librement. Si ces faux bourdons proviennent d’autres régions ou de souches non désirées, cela peut diluer la génétique recherchée.
Les faux bourdons exogènes sont un « fléau » car ils peuvent introduire des gènes indésirables dans la population locale d’abeilles. Cela compromet la pureté génétique et la sélection spécifique des apiculteurs, en particulier pour la résistance aux maladies, où des gènes spécifiques sont essentiels pour renforcer la défense des abeilles.
L’hétérozygotie, bien que souvent considérée comme un indicateur de diversité génétique et de santé dans une population, peut parfois induire en erreur.
L’hétérozygotie, qui mesure la présence de différents types d’allèles (versions de gènes) dans une population, est fréquemment perçue comme un indicateur de diversité génétique. Cependant, son interprétation peut être trompeuse. Imaginons une population avec un gène qui a initialement 37 allèles. L’hétérozygotie élevée, par exemple 0,9, suggère une diversité génétique importante.
Cependant, cette diversité peut être superficielle. Si, par sélection artificielle ou naturelle, 27 des allèles rares de ce gène sont perdus, seuls les 10 restants subsistent, chacun avec une fréquence de 0,1. Bien que l’hétérozygotie demeure élevée, donnant l’impression d’une grande diversité génétique, la réalité est que 73 % des allèles ont disparu.
En d’autres termes, l’hétérozygotie ne tient pas compte de la fréquence réelle des allèles importants pour la survie et la résistance aux maladies. Elle peut donner une fausse impression de la santé génétique réelle d’une population. Cette situation souligne la nécessité d’aller au-delà des mesures superficielles et de considérer la fréquence réelle des allèles critiques.
Ainsi, bien que l’hétérozygotie puisse indiquer une variabilité génétique apparente, elle ne reflète pas toujours la préservation des allèles cruciaux. La perte de ces allèles rares peut compromettre la capacité d’une population à s’adapter aux pressions sélectives, mettant en évidence l’importance de prendre en compte la qualité plutôt que simplement la quantité de la diversité génétique.
Les multiples causes de la mortalité des abeilles
La mortalité des abeilles mellifères est complexe et multifactorielle. L’utilisation d’insecticides, en particulier les néonicotinoïdes et d’autres pesticides tels que les fongicides, contribue de manière significative à cette menace. De plus, les herbicides, en éliminant les plantes à fleurs des champs et des prairies, ont un impact indirect négatif sur les abeilles. Cependant, un aspect souvent négligé réside dans la disparition des grandes populations panmictiques d’abeilles domestiques, ainsi que la perte d’allèles cruciaux pour la résistance aux nouvelles maladies telles que le varroa et ses virus associés, résultant de la sélection opérée par les apiculteurs.
Les multiples causes de la mortalité des abeilles
La mortalité des abeilles résulte d’une combinaison complexe de facteurs, chacun contribuant de manière significative à cette crise écologique.
Les causes principales de la mortalité des abeilles comprennent :
- Utilisation de pesticides :
Les scientifiques ont identifié les pesticides, en particulier les néonicotinoïdes, comme l’un des principaux coupables de la mortalité des abeilles.
Ces substances chimiques affectent le système nerveux des abeilles, et compromettant leur capacité à butiner et à communiquer.
Les effets néfastes sur la survie des colonies d’abeilles sont associés à l’exposition aux pesticides, comme démontré par la recherche. - Disparition des populations panmictiques :
La panmixie, qui se réfère à la reproduction aléatoire au sein d’une population, est essentielle pour maintenir la diversité génétique. Les abeilles domestiques, en raison des pratiques apicoles modernes, sont souvent soumises à une reproduction contrôlée. Cela entraîne la perte de la panmixie naturelle. Cela conduit à une diminution de la diversité génétique, rendant les populations plus vulnérables aux maladies et aux changements environnementaux. - Perte d’allèles cruciaux :
Les allèles, variantes d’un gène, sont fondamentaux pour la diversité génétique et la résistance aux maladies. La sélection artificielle effectuée par les apiculteurs, axée sur des caractéristiques spécifiques, conduit à la perte progressive d’allèles rares. Ces allèles pourraient jouer un rôle crucial dans leur capacité à résister aux menaces comme le Varroa et autres pathogènes.
La complexité de la mortalité des abeilles nécessite une approche globale pour atténuer ces problèmes.
La nécessité de préserver la diversité génétique est cruciale pour permettre aux abeilles de s’adapter aux pressions environnementales changeantes. De plus, revenir aux sous-espèces indigènes, qui ont évolué pour prospérer dans des environnements spécifiques, peut renforcer la résilience des abeilles face aux défis actuels.
La conservation de la biodiversité aide les abeilles. Les pratiques durables sont importantes. La sensibilisation aux pesticides est nécessaire. Tout cela peut inverser la mortalité des abeilles. En se concentrant sur ces aspects, on crée un environnement favorable à la survie des abeilles mellifères à long terme.
EN CONCLUSION
La préservation des abeilles mellifères, face à une mortalité croissante, requiert une approche globale. La réduction impérative de l’utilisation des pesticides vise à éviter leur impact néfaste sur les colonies. La promotion essentielle des sous-espèces indigènes permet aux abeilles de s’adapter naturellement à leur environnement. La diversité génétique, véritable pierre angulaire de la résilience des abeilles, doit être activement encouragée par des pratiques apicoles réfléchies.
Repenser les pratiques apicoles englobe l’adoption de méthodes durables, limitant la sélection artificielle en faveur d’une diversité génétique naturelle. La restauration de la diversité génétique est cruciale pour renforcer la résistance face aux maladies.
Cette approche transcende la simple nécessité de sauver les abeilles ; elle est également indispensable pour préserver l’équilibre écologique. En embrassant ces changements, nous jetons les bases d’un écosystème florissant où les abeilles prospèrent pour les générations futures. La responsabilité de leur préservation incombe à chacun. Apiculteurs ou décideurs, on peut tous contribuer à créer un avenir plus durable et lutter contre la mortalité qui les menace.
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